Au début de l’année 2013, Free jette un pavé dans la mare en annonçant le blocage automatique des publicités Google pour l’ensemble de ses clients, à l’occasion d’une mise à jour de sa Freebox Révolution. Cette information est le point de départ d’une polémique : le « FreeAdGate ». Quelques semaines plus tard, c’est Microsoft qui intègre par défaut une fonction similaire dans son navigateur IE 10.
Le blocage publicitaire pour un écosystème d’Internet ne rime-il pas avec la mort de l’accessibilité gratuite des contenus ?
L’écosystème du web est aujourd’hui majoritairement bâti sur la gratuité. Il repose sur un « business model » simple où les annonceurs couvrent l’essentiel des coûts de production d’un service mis à la disposition des internautes, mobinautes ou tablonautes. Le media attire les lecteurs ou vidéonautes avec des contenus attractifs ou informatifs en libre accès et vendent de l’espace publicitaire à des annonceurs. En d’autres termes, la publicité finance une grande majorité des contenus auxquels vous avez accès.
La question est donc ouverte. Si certains s’élèvent contre la publicité sur leurs écrans et font l’éloge du BO NOT TRACK, sont-ils pour autant prêts à payer l’accès aux contenus ? Le public est-il disposé à mettre la main au portefeuille pour visionner des vidéos sur Youtube ou lire des articles sur ses sites d’informations favoris ?
Donc à qui profiter vraiment le blocage publicitaire ? De nombreux analystes ont jugé la prise de position de Free comme plus stratégique qu’éthique. L’objectif n’était pas d’offrir une meilleure « expérience de navigation » à ses abonnés, mais plutôt de faire pression sur Google pour obtenir un accord d’échange de trafic payant, comme Orange a pu négocier dans le passé.
Si les éditeurs de navigateurs souhaitent s’octroyer le droit de réguler certains contenus, le but peut aussi sembler purement commercial, pour répondre aux attentes d’une partie des internautes. Cette politique marketing permet de redorer leur blason en adoptant une posture attractive pour les publiphobes.
La publicité sur le web a profondément impacté l’écosystème internet et permis l’avènement des contenus gratuits : de nombreux acteurs du net ne vivent qu’à travers ce modèle. Certes, certains formats intrusifs et mal ciblés peuvent en partie expliquer le refus d’un certain public d’être exposé à la publicité.
Par ailleurs, les modèles payants, à l’image de la presse écrite ou de la télévision et la radio financés par la redevance, n’excluent pas pour autant la publicité…
Enfin, Internet se veut par nature participatif, permettant à chacun de créer ses chaînes TV ou ses blogs. Mais ces opportunités de prise de parole et de diffusion de savoir et d’opinions n’existent que parce qu’il existe un financement en amont.